Déserts médicaux : en Occitanie, la Région prend les devants pour garantir l’accès aux soins

Alors que la pénurie de médecins s’aggrave partout en France, la Région Occitanie déploie un vaste plan d’action pour lutter contre les déserts médicaux. Salariat de médecins, renforcement des hôpitaux, soutien à la médecine libérale et formation des soignants : une stratégie d’ensemble a été présentée à Saint-Hilaire-de-Brethmas et Alès lors d’une journée consacrée à la santé, le mercredi 9 avril 2025.

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© Région Occitanie / Maxime Alessandrini

L’accès aux soins est aujourd’hui devenu un sujet d’inquiétude majeur pour des millions de Français. Le chiffre est sans appel : près de 8 millions de personnes vivent désormais dans ce que les autorités désignent comme un « désert médical », c’est-à-dire une zone où l’offre de soins est insuffisante voire inexistante. Dans certaines zones rurales ou quartiers périphériques, le délai moyen pour obtenir un rendez-vous chez un médecin généraliste peut dépasser les trente jours. En parallèle, six millions de citoyens n’ont pas de médecin traitant référent, tandis qu’environ 1,6 million de personnes renoncent chaque année à se soigner, faute d’accès, de moyens ou de disponibilité.

Face à cette urgence sanitaire, la Région Occitanie a fait le choix de ne pas rester spectatrice. Bien que la santé ne relève pas directement de ses compétences légales, la collectivité régionale a décidé de se mobiliser avec détermination. Depuis 2021, elle met en œuvre une série de dispositifs concrets pour apporter des réponses locales à ce qui est devenu un véritable enjeu d’équité territoriale. Le député Guillaume Garot, le répète : « La santé ne doit pas dépendre du code postal ».

Une journée pour présenter les actions régionales

Le mercredi 9 avril 2025, à l’occasion d’une journée consacrée à la santé en Occitanie, Carole Delga s’est rendue dans le Gard, à Saint-Hilaire-de-Brethmas et Alès, pour faire le point sur les avancées régionales. Elle était accompagnée de Guillaume Garot, député de la Mayenne et porteur d’une proposition de loi visant à lutter contre les déserts médicaux, ainsi que de Vincent Bounes, vice-président de la Région en charge de la santé. Ensemble, ils ont détaillé les mesures déjà mises en place et celles à venir pour garantir à chaque habitant de la région un accès digne aux soins, quelle que soit sa commune de résidence.

Salariés de la Région, les médecins reviennent dans les campagnes

C’est l’un des dispositifs les plus emblématiques de l’action régionale : le groupement d’intérêt public « Ma santé, Ma Région », créé en 2022, emploie désormais des médecins généralistes et autres professionnels de santé pour intervenir dans les zones où l’offre médicale est particulièrement déficitaire. En moins de deux ans, ce modèle a permis le recrutement de cent médecins généralistes, rejoints par six sages-femmes et quarante et un secrétaires ou assistants médicaux. Ces praticiens exercent au sein de vingt-deux centres de santé régionaux répartis dans dix départements.

Ce dispositif a permis à plus de trente-et-un mille habitants de retrouver un médecin traitant. Depuis l’ouverture des premiers centres, plus de trois cent mille consultations médicales ont été assurées. Pour les patients âgés ou isolés, près de dix-neuf mille visites à domicile ont également été réalisées, permettant une prise en charge humaine, de proximité et souvent indispensable.

L’ambition affichée par la Région est d’aller encore plus loin. À l’horizon 2028, deux cents professionnels de santé devraient être salariés via ce dispositif. Dès l’année 2025, cinq nouveaux centres ouvriront leurs portes dans les territoires identifiés comme prioritaires.

© Région Occitanie / Maxime Alessandrini

Des conditions attractives pour des vocations renouvelées

Pour attirer ces professionnels dans des zones parfois désertées, la Région leur propose des conditions d’exercice très avantageuses. Les médecins recrutés bénéficient d’un contrat de travail à temps plein ou à temps partiel, avec une durée hebdomadaire de 35 heures et la possibilité de bénéficier de RTT. Ils perçoivent une rémunération nette comprise entre 4 700 et 6 400 euros par mois. Ils travaillent dans des locaux modernes, entièrement équipés, aux côtés d’équipes pluridisciplinaires, et sont déchargés de l’essentiel des tâches administratives grâce à la présence d’un secrétariat mutualisé. Ce cadre permet un exercice médical recentré sur le soin, loin des contraintes souvent pesantes de la médecine libérale.

En contrepartie, ces médecins s’engagent à assurer des soins non programmés, à effectuer des visites à domicile et à participer à la permanence des soins les soirs, week-ends et jours fériés, conformément à l’organisation arrêtée par l’Agence Régionale de Santé. L’équilibre budgétaire du groupement est assuré en grande partie par le remboursement des consultations par l’Assurance maladie, complété par les subventions de l’ARS, de la CPAM et des collectivités locales.

Un soutien renforcé à la médecine de ville

Si le salariat médical constitue un levier puissant, la Région n’oublie pas pour autant les professionnels libéraux. Depuis 2016, elle accompagne financièrement la création ou la rénovation de maisons de santé pluriprofessionnelles, lieux où plusieurs praticiens peuvent exercer ensemble en mutualisant leurs outils et leurs charges. En neuf ans, ce sont cent quarante-trois projets qui ont vu le jour ou été consolidés grâce au soutien régional, pour un investissement total avoisinant les quinze millions d’euros. Ces structures jouent un rôle essentiel pour maintenir une offre de soins de proximité dans les zones fragiles, en particulier rurales.

Hôpitaux : reconstruire et moderniser pour garantir un accès égalitaire

L’hôpital public n’échappe pas à la crise. La Région en est pleinement consciente et a décidé d’y consacrer des moyens exceptionnels. Pour la première fois, elle intervient directement dans la reconstruction de quatre centres hospitaliers majeurs : l’hôpital médian du Sud Aveyron (9 M€), le centre hospitalier de Montauban (23 M€), celui d’Auch (18 M€) et celui de Lavelanet (1,6 M€). Au total, plus de cinquante et un millions d’euros ont été investis sur ce seul volet.

Parallèlement, trente-quatre services d’urgence et de réanimation ont bénéficié d’une enveloppe de trente millions d’euros issus du plan européen de relance REACT-EU. Ces fonds ont permis d’acheter du matériel médical de pointe, comme des échographes, défibrillateurs, robots d’analyse ou lits spécialisés, indispensables à une prise en charge rapide et efficace des patients dans les moments critiques.

La médecine spécialisée revient aussi dans les territoires

Au-delà des généralistes, la Région s’attaque à un autre problème majeur : l’accès aux spécialistes. En lien avec les CHU et les facultés de médecine, elle finance depuis deux ans vingt postes de médecins spécialistes répartis dans douze centres hospitaliers de proximité, à Sète, Béziers, Narbonne, Perpignan, Alès, Foix, Cahors, Montauban, entre autres. Ces praticiens, à mi-temps hospitalier et universitaire, assurent des consultations, encadrent des étudiants en stage et participent à des travaux de recherche. Ils couvrent des disciplines telles que la gériatrie, l’ophtalmologie, la cardiologie ou encore l’urologie, là où les besoins sont criants.

Former dès le lycée les soignants de demain

Pour enrayer durablement la crise des vocations, la Région mise sur la jeunesse. Elle a lancé une option « santé » dans les lycées, pour préparer les élèves aux études médicales dès le secondaire. Cette option propose une initiation aux méthodologies universitaires, des rencontres avec des professionnels, des stages d’observation et une participation à des campagnes de prévention. Actuellement, cette initiative est déployée dans dix-sept établissements, souvent situés en dehors des grandes métropoles. À la rentrée 2025, quatre lycées supplémentaires rejoindront ce réseau.

Cette politique s’inscrit dans un effort plus large : depuis 2019, quarante nouveaux sites de formation aux métiers du soin ont été créés en dehors des grandes villes. Plus de dix-sept mille apprenants sont aujourd’hui formés en Occitanie, dont cinq mille bénéficient d’une bourse financée par la Région. Chaque année, mille sept cents nouvelles places sont ouvertes dans les instituts de formation.

L’Occitanie veut devenir un leader européen de la santé

Enfin, la Région ne limite pas son action à l’accès aux soins. Elle entend aussi devenir un acteur stratégique de l’innovation médicale à l’échelle européenne. Le contrat de filière santé, doté de cent cinquante millions d’euros, vise à développer une industrie régionale forte autour de la recherche, de la biothérapie, de l’intelligence artificielle médicale et de la relocalisation de productions stratégiques. À Montpellier, le projet MedVallée, qui associe entreprises, universités et centres hospitaliers, ambitionne de créer un pôle d’excellence mondial dans le domaine du soin, de la nutrition et de la prévention.

Une Région engagée, un État attendu

Malgré l’ampleur de son action, Carole Delga tient à le rappeler : la Région n’a pas vocation à se substituer à l’État. Elle agit par nécessité, face à l’inaction ou à l’insuffisance des réponses nationales. C’est pourquoi elle soutient pleinement la proposition de loi portée par Guillaume Garot, qui vise à réguler l’installation des médecins, renforcer la formation sur tout le territoire et rétablir la permanence des soins. Déjà adoptée partiellement à l’Assemblée nationale, cette loi pourrait constituer un tournant si elle parvient à être votée dans son intégralité dans les prochaines semaines.